Philippe Crevel, directeur général du Cercle de l’Épargne
Vous réalisez cette enquête tous les ans, quelles sont sur la durée les constantes que vous avez relevées ?
C’est en effet la troisième enquête que nous réalisons avec AMPHITÉA et AG2R LA MONDIALE, mais nous la menons depuis 2004. Sur la durée, nous pouvons dire que les Français aiment l’épargne et que pour épargner, ils privilégient la sécurité et la liquidité.
Leur intérêt pour l’immobilier ne se dément pas car ils pensent qu’il est le support le plus sûr et le plus liquide, même si la réalité est bien différente !
Côté retraite nous constatons une forte angoisse qui s’accentue chaque fois que l’on évoque une réforme avec une forte opposition à tout report de l’âge de départ.
L’enquête 2017 a-t-elle marqué une rupture ou une inflexion ?
Non, nous restons dans les mêmes tendances, si ce n’est une grande nouveauté : le retour en grâce des actions. Elles progressent de 9 points avec 38 % des personnes interrogées qui considèrent qu’elles sont un support intéressant pour épargner. Les détenteurs de produits financiers les plébiscitent à 45 % et ce taux monte même à 68 % pour ceux qui ont souscrit un Plan d’épargne en actions.
Il s’agit là de déclarations d’intention. Dans les faits que se passe-t-il ?
On commence à voir une vraie inflexion dans la collecte en faveur des unités de compte. Alors que leur part était descendue à 14 %, elle est remontée au-dessus de 25 %, ce qui commence à être significatif.
Comment expliquer cette progression des actions ?
Trois facteurs se conjuguent : tout d’abord, la crise financière de 2008 et celle des dettes souveraines de 2011 avaient entraîné un fort repli des actions, mais leur souvenir s’estompe. Ensuite la bourse a connu des bons résultats ces derniers mois. Enfin le rendement des autres placements est baisse.
Cela veut-il dire que les Français sont un peu moins « accros » à la sécurité ?
La sécurité constitue toujours un élément de choix important. Interrogés sur un éventuel placement dans un contrat d’assurance-vie, 41 % des sondés privilégient le fonds euros quand seulement 18 % optent pour les unités de compte. 41 % ne souhaitent pas investir dans l’assurance-vie. Les fonds euros arrivent largement en tête chez 51 % des seuls épargnants. Pour ceux qui sont déjà détenteurs d’un contrat, le taux est encore plus élevé et atteint 59 %.
Enfin, seulement 40 % de ceux qui déclarent que les unités de compte sont des placements intéressants, sont disposés à placer une partie de leur épargne sur ce type de support…
Quid de l’assurance-vie justement ?
Elle a un peu perdu du terrain depuis la baisse de rendement des fonds euros et la polémique engendrée par la loi Sapin 2 prévoyant le blocage temporaire des contrats en cas de crise systémique. Mais elle reste néanmoins le produit phare, le produit préféré des Français qui la jugent toujours extrêmement intéressante.
Il a été envisagé de réduire la fiscalité sur les produits d’épargne risqués en la compensant par une augmentation sur les produits non risqués. Une idée populaire ?
Non, elle ne reçoit l’assentiment que de 22 % des sondés, 78 % y étant opposés. C’est clair, les Français tiennent au régime fiscal dont bénéficie l’épargne réglementée, mais aussi à celui dont bénéficient les fonds euros et l’assurance-vie.