En 2023, un système de retraites légèrement excédentaire mais des situations hétérogènes selon les régimes
Alors que l’équilibre financier du système de retraites s’était dégradé de 2002 à 2010, il s’est depuis progressivement rétabli malgré l’arrivée à l’âge de la retraite des générations nombreuses du baby-boom.
En 2023, le système de retraites a été excédentaire de 8,5 Md€, ce qui peut s’expliquer par deux facteurs principaux.
• D’abord, les nombreuses réformes intervenues depuis 2003 ont permis, entre 2010 et 2023, un recul de 2 ans et 2 mois de l’âge réel auquel les actifs partent en retraite.
• Ensuite, l’accélération de l’inflation, qui s’est répercutée plus rapidement sur les recettes que sur les dépenses de pension, a amélioré provisoirement la situation financière de 4 Md€ en 2023 et dégrade d’autant celle de 2024.
Six groupes de régimes de retraites ont été identifiés par la Cour, avec des situations financières très différentes. Le régime général et celui des salariés agricoles sont dans une situation financière précaire et constituent l’enjeu principal de l’équilibre financier du système.
Bien que le déficit de ces deux régimes et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) soit faible en 2023 (0,2 Md€), il s’accroît dès 2024.
La caisse de retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers se trouve, quant à elle, d’ores et déjà dans une situation critique, avec un déficit de 2,5 Md€ en 2023.
D’autres régimes bénéficient d’une situation plus favorable, comme ceux des professions libérales et des avocats ou les régimes complémentaires obligatoires. L’excédent total de ces derniers a atteint 9,9 Md€ en 2023.
Une nette dégradation de la situation financière en cours et à l’horizon 2045, malgré la réforme de 2023
La Cour a examiné la projection de l’équilibre du système de retraite à l’horizon 2045, les incertitudes devenant trop importantes au-delà. Les perspectives sont préoccupantes malgré la réforme de 2023.
Dès 2025, le déficit (tous régimes compris) devrait atteindre 6,6 Md€. Il devrait se stabiliser autour de ce montant jusque vers 2030, grâce notamment à la montée en puissance de la réforme de 2023.
Le déficit devrait ensuite se dégrader continûment et atteindre près de 15 Md€ (hors inflation) en 2035, puis autour de 30 Md€ en 2045.
L’hypothèse de progression de la productivité du travail retenue n’a pas une influence significative sur les projections : moins de 1 Md€ d’écart entre les deux scénarios en 2035 et autour de 7 Md€ en 2045.
La Cour a examiné les effets à venir des dernières réformes des retraites, notamment celle de 2023. Elles devraient permettre un recul notable de l’âge réel auquel les actifs partent à la retraite. En conséquence, le nombre de retraités devrait se réduire, ce qui améliorerait l’équilibre du système.
S’agissant de la réforme de 2023, les effets sur l’équilibre financier du seul système de retraites, tous régimes inclus, ont été estimés autour de 10 Md€ à horizon 2030, avant de se réduire.Les déficits futurs seraient augmentés d’autant en l’absence de la réforme.
La réforme de 2023 aurait également un effet positif sur les recettes des autres administrations publiques, d’une ampleur comparable à celui sur le système des retraites à l’horizon 2030, mais il se réduirait également avec le temps.
Enfin, la durée moyenne passée à la retraite, après une phase de diminution, redeviendrait équivalente à celle avant réforme, grâce aux gains d’espérance de vie. Le montant des pensions et les conditions de vie des retraités seraient meilleurs (hors inflation) en 2045 qu’en 2023, malgré un écart croissant avec les revenus perçus par les actifs.
Les principaux leviers de réforme et leurs effets sur l’équilibre financier du système de retraites obligatoires
La solidarité intergénérationnelle d’un système par répartition exige d’en assurer l’équilibre financier sur le long terme. La Cour présente une revue des principaux leviers à la disposition des pouvoirs publics et analyse leurs effets sur l’équilibre financier du système de retraites.
À ce titre, elle a choisi d’examiner quatre leviers dont l’impact budgétaire sur le système est direct : âge d’ouverture des droits, durée d’assurance requise, taux de cotisation, indexation des pensions.
Des variations à la hausse ou à la baisse de ces différents leviers ont été réalisées et leurs effets estimés pour l’année 2035.
L’avancée d’un an de l’âge d’ouverture des droits (63 ans au lieu de 64) représenterait une dépense supplémentaire pour le système des retraites de 5,8 Md€ en 2035.
Son recul d’un an (65 ans au lieu de 64) rapporterait jusqu’à 8,4 Md€. La diminution d’un an de la durée d’assurance requise (42 ans au lieu de 43 ans) coûterait 3,9 Md€ au système de retraite en 2035 alors que son augmentation (44 ans au lieu de 43 ans) rapporterait 5,2 Md€.
Une augmentation d’un point du taux de cotisation apporterait des recettes supplémentaires comprises entre 4,8 et 7,6 Md€ selon les modalités retenues.
Enfin, une sous indexation d’un point des pensions sur la base des dépenses de retraites prévues en 2025 représenterait une économie de 2,9 Md€ cette même année.