Bercy-Infos a mis en ligne le 9 février dernier, un topo de présentation sur les cryptoactifs et les cryptomonnaies. Que nous dit le ministère des Finances sur cette classe d’actifs très particulière à la réputation sulfureuse ?
Cryptoactifs, de quoi parle-t-on ?
Selon la Banque de France, un cryptoactif est « un actif numérique (ou digital), créé grâce à l’utilisation de technologies de cryptographie. Ils sont nommés ainsi car ils s’apparentent à des actifs financiers et sont créés et utilisés via des technologies de cryptage ».
De manière globale, les cryptoactifs représentent des actifs virtuels stockés sur un support électronique permettant à une communauté d’utilisateurs les acceptant en paiement de réaliser des transactions sans avoir à recourir à la monnaie légale.
Cryptoactifs ou cryptomonnaies ?
Les cryptoactifs sont parfois appelés abusivement cryptomonnaies, mais ne doivent pas être confondus avec une monnaie.
Sur un plan juridique, ils ne dépendent d’aucune institution et ne bénéficient pas d’un cours légal.
De plus, ils ne remplissent pas, selon la Banque de France, pas les trois fonctions qui définissent une monnaie et ne sont véritablement ni un instrument d’échange au quotidien, ni une unité de compte permettant de comparer aisément les prix des différents biens et services, ni une réserve de valeur.
Comment ça marche ?
La technologie employée est celle de la blockchain (chaîne de blocs ou registre de transactions, en français), qui permet de garder la trace d’un ensemble de transactions, de manière décentralisée, sécurisée et transparente.
Plus concrètement, la blockchain permet à ses utilisateurs – connectés en réseau – de partager des données sans intermédiaire.
Les blocs sont validés par ce qu’on appelle les « mineurs ». Un mineur est une personne qui met son ordinateur à disposition sur le réseau informatique utilisé par la blockchain.
Les différents ordinateurs disponibles vérifient que personne n’a essayé de frauder et que la transaction de cryptoactifs est bien valide.
Une fois que la transaction est validée, celle-ci est cryptée (traduite en langage informatique) et datée pour être intégrée dans la blockchain.
Les mineurs, qu’on appelle aussi les « nœuds » du réseau sont rémunérés à chaque bloc « miné » (validé, crypté et intégré à la blockchain) par des cryptoactifs.
Une fois créés, ces cryptoactifs sont stockés dans un coffre-fort électronique enregistré sur l’ordinateur, la tablette ou le portable de l’utilisateur, voire à distance (par exemple, dans le cloud).
Il est ensuite possible de les transférer via Internet et de façon anonyme entre les membres de la communauté.
Les cryptoactifs sont-ils sûrs ?
Il s’agit d’actifs spéculatifs et très risqués.
Pour faire face aux utilisations abusives et protéger les investisseurs, l’Union européenne a mis en place le règlement MiCa (Markets in Crypto Assets), appelé à remplacer les réglementations nationales, dont la française.
Quels sont les risques ?
Les risques relèvent d’une possibilité de bulle spéculative, du piratage informatique dans la conservation des cryptoactifs, du blanchiment de capitaux.
Les conseils de l’AMF
Si vous souhaitez investir dans les cryptoactifs, voici cinq conseils pratiques de l’Autorité des marchés financiers :
- Vérifiez les listes noires de l’AMF avant d’investir,
- passez par un prestataire enregistré auprès de l’AMF,
- sécurisez la conservation de vos cryptoactifs,
- ne perdez et ne communiquez jamais votre clé privée,
- vérifiez toujours l’exactitude d’une adresse publique.
Fabrice Heuvrard, Expert-comptable et commissaire aux comptes
« Les cryptomonnaies, on y croit ou pas, c’est un pari sur l’avenir »
Expert-comptable et commissaire aux comptes, Fabrice Heuvrard est également Correspondant régional d’AMPHITÉA. Précurseur dans le domaine des cryptomonnaies, auteur de nombreux articles de référence sur le sujet, il partage avec nous son expérience sur le sujet.
Quel est l’intérêt des cryptoactifs ?
Leur rendement. Pour ne citer que le Bitcoin, sa valeur a été multipliée par 50 000 en dix ans. Il ne valait rien en 2009 quand il a été créé, mais il valait 50 000 euros en 2024 et il vaut encore 40 000 euros aujourd’hui. Les cryptomonnaies, on y croit ou pas, c’est un pari sur l’avenir.
Ont-ils d’autres avantages que ce rendement exceptionnel ?
Oui, leur discrétion. Si vous avez l’intention d’échapper à l’impôt et que placez votre argent sur un compte-titres, le fisc n’aura aucun mal à vous pister.
Par contre, si vous placez des fonds dans une cryptomonnaie stockée sur un périphérique ou une clé sécurisée, qui le saura ?
Quel type d’investisseur peut-il s’intéresser aux cryptoactifs ?
Potentiellement tout le monde peut s’y intéresser. Néanmoins, il s’agit de fonds hyper spéculatifs et il faut donc, premièrement, faire preuve d’une forte appétence au risque.
Deuxièmement, la nature même des cryptoactifs fait que leur système de sauvegarde n’a rien à voir avec les système bancaire ou assurantiel classiques.
Pour conserver vos bitcoins, par exemple, vous avez deux solutions : soit via une clé USB spécifique, soit via un prestataire (PSAN : Prestataire de Service sur Actif Numérique).
Mais attention, si vous perdez le code de votre clé, impossible de récupérer vos fonds.
Or, la clé n’est pas la même que celle sur laquelle vous stockez vos données habituelles.
Elle est nettement plus sophistiquée et réclame un protocole qui demande une vraie fibre informatique. Autrement dit, vous devez être un geek averti pour la manipuler.
Quant au prestataire, vous devez lui faire totalement confiance, ce qui n’est pas évident dans un univers où pullulent les arnaques.
À qui s’adresser ?
Les partenaires de confiance sont répertoriés sur une liste blanche validée par l’Autorité des marchés financiers (AMF). Néanmoins, personnellement, je préfère ne pas avoir recours à un intermédiaire…
Outre les risques liés aux arnaques et à la conservation, y a-t-il d’autres raisons de manier les cryptomonnaies avec précaution ?
Oui, on manque d’antériorité sur la récupération des fonds dans le cadre d’une succession. Comment y accéder et les rendre disponibles pour les intégrer dans l’actif successoral ?
Pour le moment, je ne suis pas sûr que les notaires soient très au clair sur ce point.