Les produits d’épargne réglementée se distinguent par le fait que leur capital est garanti et que les pouvoirs publics fixent un grand nombre de leurs règles de fonctionnement (rémunération, plafond de versement, allocation de l’épargne, etc.). Cette catégorie comprend quatre livrets : le Livret A, le Livret de Développement Durable et Solidaire, le Livret d’Épargne Populaire, le Livret d’Épargne Jeune.
On y range aussi l’épargne logement (PEL et CEL) et le Livret d’Épargne Entreprise.
Le fait que ce soit l’État qui contrôle son fonctionnement et garantisse sa stabilité confère à l’épargne réglementée une grande attractivité. Rien d’étonnant, donc, si avec 834 milliards d’euros d’encours, elle représente 14% de l’épargne financière des ménages, selon le rapport que la Cour des comptes lui consacre chaque année.
Une valeur refuge
Mieux encore, elle est considérée comme un refuge pour l’épargne des Français en période d’incertitude : 45 milliards d’euros supplémentaires ont ainsi été déposés sur ses livrets pour la seule année 2020, première année de la crise de la Covid-19.
L’épargne réglementée est gérée par la Caisse des dépôts et consignation (CDC) et par les établissements bancaires.
Sources : Banque de France, Cour des comptes, Cercle de l’Épargne
Livret A
• Conditions d’ouverture : un seul livret A par personne (majeur ou mineur).
• Plafond : 22 950 euros.
• Versements et retraits : les deux sont libres. Le montant minimal est de 10 euros (1.5 € à la Banque Postale).
• Rémunération : fixée par l’État, elle est de 3% depuis le 1er février 2023. Le calcul des intérêts se fait par quinzaine.
• Fiscalité et prélèvements sociaux : exonération.
• Spécificité : une partie de l’épargne collectée sert au financement du logement social.
• Transfert : il est impossible, il faut clôturer son livret avant d’en ouvrir un dans une autre banque.
• Clôture : elle est possible à tout moment, sur simple demande (courrier ou guichet) auprès de la banque.
• Chiffres clé : il y avait 55,7 millions de Livret A au 31 décembre 2021, dont 54,9 millions détenus par des personnes physiques, soit 80,9 % de la population.
Livret de développement durable et solidaire (LDDS)
• Conditions d’ouverture : toute personne ayant son domicile fiscal en France peut ouvrir un LDDS dans la limite d’un par personne et de deux au maximum par foyer fiscal.
• Plafond : 12 000 euros.
• Versements et retraits : ils sont libres avec un montant minimal fixé par la banque, généralement de 10 euros.
• Rémunération : identique à celle du Livret A, 3% depuis le 1er février 2023.
• Fiscalité et prélèvements sociaux : exonération.
• Spécificité : les fonds sont en partie affectés au financement des PME, de la transition énergétique, de l’économie sociale et solidaire ou de la lutte contre le dérèglement climatique.
• Transfert : il est impossible, il faut clôturer son livret avant d’en ouvrir un dans une autre banque.
• Clôture : elle est possible à tout moment, sur simple demande (courrier ou guichet) auprès de la banque.
Livret d’épargne populaire (LEP)
• Conditions d’ouverture : toute personne ayant son domicile fiscal en France peut ouvrir un LEP dans la limite d’un par personne. Le montant minimal à verser est de 30 euros.
• Conditions de revenus : le revenu fiscal ne doit pas excéder un certain seuil : moins de 21.393 euros pour une personne seule, ou 32.818 euros pour un couple (deux parts) en 2023.
• Plafond : 7 700 euros.
• Versements et retraits : ils sont libres. Le montant minimal est de 10 euros.
• Rémunération : fixée par l’État, elle est de 6,10 % depuis le 1er février 2023. Le calcul des intérêts se fait par quinzaine. Les intérêts sont calculés au 31 décembre.
• Fiscalité et prélèvements sociaux : exonération.
• Transfert : il est possible entre les établissements habilités à proposer le LEP.
• Clôture : elle est possible à tout moment, sur simple demande (courrier ou guichet) auprès de la banque.
• Chiffres clé : il y avait à 8,5 millions de LEP ouverts fin 2022 pour un encours de 49,84 milliards d’euros d’encours. Mais la majeure partie des 18,6 millions de personnes éligibles n’en a pas encore ouvert.
Livret jeune
• Conditions d’ouverture : il est réservé aux 12 – 25 ans, dans la limite d’un seul livret par personne. Il faut une autorisation du représentant légal pour les moins de 16 ans.
• Plafond : 1 600 euros.
• Versements et retraits : ils sont libres. Le montant minimal est de 10 euros.
• Rémunération : elle est fixée par la banque, mais son taux doit être au moins égal à celui du Livret A. Le calcul des intérêts se fait par quinzaine. Les intérêts sont calculés au 31 décembre.
• Fiscalité et prélèvements sociaux : exonération.
• Spécificité : un livret jeune doit être clôturé au 31 décembre de l’année des 25 ans de son titulaire. Il peut être assorti d’une carte de retrait.
• Transfert : impossible, il faut clôturer son livret avant d’en ouvrir un dans une autre banque.
• Clôture : elle est possible à tout moment, sur simple demande (courrier ou guichet) auprès de la banque.
• Chiffres clé : l’encours des Livrets jeune était de 4,76 milliards d’euros fin 2022.
Bon à savoir
On peut faire des virements sur, ou depuis son livret A, LEP, LDDS ou Livret Jeune, uniquement depuis un compte de dépôt ouvert à son nom, sauf exception (*).
À partir du 1er juillet 2023, les banques dépositaires d’un de ces livrets ne pourront plus imposer que le compte de dépôt et le livret concernés soient tous deux ouverts dans leur établissement.
(*) Sauf les prestations sociales versées par les collectivités publiques et les organismes de sécurité sociale et les pensions des agents publics qui peuvent être directement versées sur le livret A. De même certains prélèvements (impôts, eau, gaz, électricité…) peuvent y être débités directement.
Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Épargne
L’avis de l’expert
Trois questions à Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Épargne
Le passage du taux du Livret A de 2 % à 3% est certainement une bonne nouvelle pour les épargnants, mais en est-ce une pour l’économie française ?
Le relèvement du taux du Livret A a immédiatement amené une collecte record au mois de janvier 2023, +9,27 milliards d’euros pour le Livret A.
L’effet taux a joué pleinement même si ce dernier ne couvre que la moitié de l’inflation. Les ménages ont commencé malgré tout à réduire leurs liquidités qui dormaient sur leurs comptes-courants au profit du Livret A et du LDDS.
Cette augmentation du taux du Livret A et du LDDS a un coût pour les banques et la Caisse des Dépôts qui centralise une majorité de la collecte.
Ces derniers doivent trouver des ressources ayant un rendement supérieur pour s’acquitter des intérêts et des frais de gestion. Le relèvement des taux administrés contribue donc au renchérissement du coût du crédit et en premier lieu pour les bailleurs sociaux qui se financent notamment à partir des ressources du Livret A.
Les collectivités locales et les entreprises sont également affectées. L’économie française manque d’épargne longue investie dans les entreprises. Ces dernières ont besoin de fonds propres pour se moderniser, accélérer la transition énergétique et se digitaliser.
Pourquoi, malgré un taux d’inflation conséquent, les épargnants continuent-ils à faire confiance aux livrets réglementés ?
Les livrets combinent simplicité et universalité. Ils sont compris de tous et largement diffusés au sein de la population. Les livrets réglementés reposent sur un triptyque : la sécurité avec la garantie du capital, la liquidité et une fiscalité zéro.
L’épargnant a la certitude de ne pas perdre l’argent qu’il a placé sur son livret ; il peut entrer et sortir à sa guise ; il ne paie pas d’impôt et de prélèvements sociaux.
Il peut déplorer que le rendement soit insuffisant et qu’il ne compense par l’inflation, mais in fine, il en fait fi. En 2022, le rendement moyen du Livret A a été de 1,37 % pour une inflation de 5,2 %.
La hausse des taux de l’épargne réglementée va-t-elle remettre en question le statut de placement financier préféré des Français de l’assurance vie ?
Les livrets réglementés et l’assurance vie sont des placements de nature différente. Les premiers appartiennent à la sphère de l’épargne de précaution quand la seconde est le vaisseau amiral de l’épargne de long terme.
L’assurance-vie permet tout à la fois de financer un achat ou un projet important du ménage, préparer la retraite et organiser la transmission du patrimoine. Elle est dotée d’un régime fiscal attractif. Elle permet de déroger, sous certaines conditions, au droit de la succession (impôts et bénéficiaires).
L’assurance-vie, à la différence des livrets réglementés, n’est pas plafonnée et ouvre l’accès à un grand nombre de supports. Elle permet de concilier garantie, avec le fonds euros, et rendements potentiels, avec les unités de compte.
Si aujourd’hui, le taux du Livret A est à un niveau équivalent à celui des rendements des fonds euros, ces derniers ont enregistré une augmentation en 2022, après une longue phase de baisse. Sur moyenne et longue période, le rendement des unités de compte est plus élevé que le rendement des produits réglementés et celui des fonds euros.
L’assurance-vie, couteau suisse de l’épargne française, a encore de beaux jours devant elle. Il en est de même pour son petit cousin, le Plan d’Épargne Retraite individuel.